Bois-Thibault (le) - Tome I

Bois-Thibault (le), chât. en ruine et h., cne de Lassay, à 1 200 m. N. de la ville, entre les routes de Geneslay et de Sept-Forges. — J. de Nemore Thebaudi, 1245 (Cart. de Fontaine-Daniel). — Bois-Thébault, 1413 (Arch. nat., R/5, 384, f. 244). — Capella de Bosco-Theobaldi, XVe s. (Pouillé). — La maison du Boys Thébault, 1590 (Reg. par. de Saint-Martin de Mayenne). — Bois-Thibault, chât., chapelle fondée, deux étangs, min et passage de la route de Lassay à Domfront (Jaillot). — Bois-Thibault, chât. et chap. (Cassini). — Fief et seigneurie du marquisat de Lassay à qui le sénéchal du comté du Maine conteste, en 1454, le droit de haute justice. Le château, dans son enceinte resserrée de douves, fut reconstruit en tout ou en partie après la guerre de Cent-Ans (1467), avec « semblables tours à canonnières et arbalétrières à celles de Lassay » ; il était l'un des plus considérables de la baronnie de Mayenne. Les deux corps de bâtiments en sont reliés par un porche à cintre ogival, dominés et défendus par des mâchicoulis. A droite, sont les appartements qui furent habités jusque vers 1830 et qui ont perdu intérieurement tout caractère. On remarque cependant la cheminée monumentale de la cuisine. Bien plus intéressantes sont les parties N. et N.-E., celle-ci du commencement du XVIe s., dominées par les deux hautes tours. Au commencement du XVIe s., des brèches furent pratiquées du haut en bas pour ouvrir après coup dans ces épaisses murailles des fenêtres d'un style plus moderne et plus élégantes. L'escalier était d'une pente si douce, dit-on, qu'un cheval pouvait le gravir. Des salles ou celliers voûtés règnent sous ces deux ailes, divisés en deux nefs par un rang de piliers trapus à chapiteaux carrés, sans ornements ; ces voûtes d'arêtes, qui se pénètrent les unes les autres comme celles des cryptes romanes, ont résisté jusqu'à présent aux infiltrations dont rien ne les protège plus, ni toits ni planchers. Puissent ces ruines majestueuses, qui ont tenté bien des pinceaux, exister longtemps encore ailleurs que dans les albums mayennais !

Indépendamment de celle de ses seigneurs, le château a son histoire. Abandonné par ses possesseurs lors de l'invasion du pays par les Anglais, vers 1425, il fut réoccupé par une compagnie écossaise au service de Charles VII, qui s'y fortifia. Mais celle-ci s'étant rendue par ses déprédations aussi intolérable à la population indignée du parti français qu'elle avait pu être redoutable aux envahisseurs, Jean, duc d'Alençon, ne tarda pas à l'en déloger. — Au commencement des guerres de religion (1562), le manoir fut saccagé par les huguenots de Lassay ; mais, fortifié par Charles du Bellay, l'un des chefs de la Ligue dans le Bas-Maine, il résista à une attaque d'Arnault de Beauville, sieur de l'Estelle, capitaine de Mayenne, qui, après l'avoir fait battre inutilement par son artillerie et avoir perdu beaucoup de soldats sous ses murs, fut obligé de se retirer le samedi 20 octobre 1590. Pendant les troubles de 1616, les paroisses du canton mirent à l'abri dans les caves du château les ornements les plus précieux des églises. Enfin, le 3 août 1789, les pillards et incendiaires voulurent aussi saccager le Bois-Thibault et brûler le chartrier, mais ils rencontrèrent une résistance qui les découragea. — M. l'abbé Postel a daté du château des Soirées du Bois-Thibault, qui rappellent de très loin les Soirées de Saint-Pétersbourg et qui, pour nous, ont le défaut d'être entièrement dépourvues d'intérêt local.

La chapelle, fondée par Herbert de Logé avant 1232 et dédiée à sainte Catherine, fut probablement rebâtie et dotée à nouveau au XVIe s., peu après la reconstruction du château, par Louis du Bellay, archidiacre de Paris. Contre son habitude, le chanoine Le Paige a consacré une bonne page au château du Bois-Thibault. Voici ce qu'il dit de la chapelle : « Sur l'une des croix peintes sur le mur, on lit : Indulgences plénières accordées par le pape à ceux qui visiteront et donneront de leurs biens à ladite chapelle, approuvées par le cardinal de Bourbon, évêque du Mans. Ces indulgences ont été accordées à Louis du Bellay, grand archidiacre de Paris, conseiller au Parlement, seigneur du Bois-Thibault. On voit dans cette chapelle, au côté droit, un mausolée, dont la statue brisée en plusieurs morceaux représente l'archidiacre du Bellay. Dans le fond de ce mausolée, on lit : Icy gist le cœur de haut et puissant messire Louis du Bellay, abbé de Reuge et grand archidiacre de Paris, fondateur de cette auguste et sainte église, qui fut consacrée par les éminentissimes Cardinaux de Bourbon, évesque du Mans, et du Bellay et par le révérendissime évesque de Séez ; dans laquelle fut érigée la paroisse du Bois-Thibault, avec droit de toutes fonctions curiales au chapelain et de conserver le Très-Saint-Sacrement de l'Autel ; ce qui a esté interrompu par les fureurs des hérétiques. Priez Dieu de donner la paix éternelle à son âme. A la tête du même mausolée est écrit : Les hérétiques, après avoir brisé les figures des saints qui étoient dans cette église, brisèrent en mesme temps la statue de Louis du Bellay, qui le représentoit à genoux sur ce monument. Au pied de ce monument est la figure d'un cœur. Dans la nef sont huit tombes, avec des croix de Malte, des bustes, des épées. » — En 1766, à la requête de Léonor-François de Tournely, il fut reconnu que les seigneurs avaient droit de se faire inhumer dans la chapelle et dans le petit cimetière y annexé. M. Ponthault, curé de Saint-Loup-du-Gast, qui fut chargé d'une enquête, trouva la chapelle « en bonne et suffisante réparation, bien décorée et suffisamment munie de toutes choses nécessaires pour la célébration des saints mystères ; le cimetière clos de murs, dans lequel il y a une grande croix de pierre. » — D'après les anciens aveux, la chapelle avait le corpus Domini. Une nouvelle bénédiction fut donnée au cimetière au XVIIIe s. en même temps qu'était prorogée la permission de dire la messe dans la chapelle tous les jours, excepté aux quatre fêtes principales. A toutes les époques, ce bénéfice est désigné sous le titre de « cure de Sainte-Catherine » ou de « chapelle-cure du Bois-Thibault ». Ce sanctuaire, dont il ne reste plus rien, occupait avec le cimetière un terrain séparé maintenant du château par le chemin, et du côté de l'aile droite. Il fut pillé par les huguenots en 1590. Le premier chapelain connu est Urbain Dubois, curé de Rennes-en-Grenouilles, « chaspellain et serviteur de la chapelle fondée en l'estre ou manoir du Boisthibault, ou assez près d'icelluy », 1380, 1401 ; le dernier est Julien-Jean Leriche, curé de Melleray, précepteur, en 1776, des enfants Tournely, aux appointements de 200 , 1788.

Seigneurs : Herbert de Logé, sénéchal de Mayenne, transige avec les moines de Fontaine-Géhard, au sujet des dîmes de Saint-Fraimbault, † avant 1232. — Hamelin de Logé fait, au sujet du patronage de la chapelle du Bois-Thibault, fondée par le précédent, son père, un accord avec le prieur de Mayenne. Jeanne du Bois-Thibault, veuve de Maurice de l'Écluse, qui choisit sa sépulture dans l'église de Fontaine-Daniel en 1245, et Philippot du Bois-Thibault, écuyer de la compagnie de Robert de Vendôme en 1380, sont sans doute de cette famille. — Geoffroy de Logé, mari d'Agaice de la Baroche-Gondouin, 1326. — Jean de Logé, 1350. — Jean de Logé, 1368, fils du précédent, époux de B. de la Ferrière et père de Jean de Logé. Ce dernier, mari de Jeanne de Vendôme, « issu de noble et honorable lignée, ayant servi, luy, son père et ses prédécesseurs, le roy et ses prédécesseurs en leurs guerres », se rendait du Bois-Thibault à Mayenne le jour de Quasimodo de l'an 1404, quand, avant d'arriver à Lassay, il se prit de querelle avec un individu qu'il blessa mortellement. — La dame du Bois-Thibault cède, en 1413, à Aimery de Logé quelques biens contentieux entre elle et Jean de Melleray. — Jean de Logé, époux de Jeanne de Montgiroul, veuve dès 1420, remariée à Pierre d'Arquenay et décédée en 1477. — Jean du Bellay, mort le 18 septembre 1480, mari de Jeanne de Logé ; ils sont les auteurs de tous ceux qui ont rendu ce nom si illustre dans l'Eglise, dans les armes et dans les lettres. Les deux époux reposent dans l'église de l'abbaye du Louroux, en Anjou. On peut leur attribuer la construction du château du Bois-T. — Eustache du B., fils aîné, fait aveu du Bois-T. en 1485 ; après la mort de sa femme, Catherine de Beaumont, il entre dans les ordres et meurt après 1510 en odeur de sainteté. — Louis du Bellay, archidiacre de Paris, 1525, inhumé dans la chapelle Saint-Crespin, à N.-D. de Paris, où son épitaphe se lisait encore au XVIIe s. : Cy-gist noble et vénérable personne, Mre Loys du Bellay, en son vivant conseiller du R. N. S., grand archidiacre et chanoine de l'église de céans, seigneur du Boisthibault… lequel a esté inhumé par Rev. cardinal du Bellay, évesque de Paris, le 5e jour de janvier 1541. — Il construisit le grand corps de logis N.-O. du château du Bois-Thibault. — François du B., petit-neveu de l'archidiacre, époux de Louise de Clermont, † 1553. — Jacques du Bellay, fils d'Eustache du B. et de Guyonne d'Orange, comte de Tonnerre, 1562, date du château de Bizeux, le 10 décembre 1573, un acte de présentation de la chapelle du Bois-T. Il épousa Antoinette de la Palu, dame de la Palu et de Soulgé, 1537, † 20 juillet 1580. — Charles du B., petit-fils du précédent, marié en 1589 à Radegonde des Rotours et mort le 14 décembre 1613. Éléonore, leur fille, naît au Bois-T. en 1602, mais Brandelis (1609), Charlotte (1613), naissent au château de la Feuillée, où meurt Charles du B., inhumé le 15 septembre 1613 dans l'église d'Alexain. — René du B., seigneur du Bois-T. dès 1619, en rendit aveu en 1660 et y mourut le 12 septembre 1662 ; il fut quand même inhumé à Alexain, où étaient nés ses enfants : François-Malo 1639, Charlotte 1642, non de sa première femme, Marie de Thou, mais de Renée de la Marzelière, qui, veuve, se remaria à Jacques-Augustin de Thou, président au parlement et ambassadeur en Hollande, et lui survécut jusqu'en 1691. A la suite d'arrangements intervenus entre elle et les héritiers de René du Bellay, Renée de la Marzelière devint propriétaire du Bois-T., qui passa à Gillonne de la Marzelière, sa sœur, épouse de René du Matz, comte du Brossay. — Louis-Charles du Matz, marquis du Brossay, comte du Mesnil-Barré, petit-fils de Gillonne de la Marzelière, époux de Marie de la Baulne-Le Blanc, 1715, † 1729. — Joseph Joachim du Matz, frère du précédent, 1732. — Marie-Clarisse-Vincente du Matz, sœur des deux précédents, sur qui le Bois-T. fut vendu par décret à Léonor-François de Tournely, 1762. Le nouveau propriétaire, qui avait épousé le 22 juin 1761 Jeanne-Mathurine du Plessis-Mongenard, habita le Bois-T. ; il était mort en 1775, laissant pour enfants : François-de-Paule, Léonor-François, Jean-Pierre, Marie-Madeleine et Marie-Élisabeth. Le propriétaire actuel, M. le comte de Saint-Paul, est le descendant direct de cette famille.

Marquis de Beauchesne : le Château de Lassay, passim, et notes mss. de son fils, M. le marquis de Beauchesne. — Comm. hist., (Procès verbaux et documents), t. IV, p. 28. — Bull. de la Comm. hist. de la M., t. X, p. 80, 194 ; t. VIII, p. 109 et suiv. — Arch. nat. R/5. 382, 383 ; P. 437 ; Q/t. 699 ; X/1a. 105, f. 63 ; JJ. 175, n. 75. — Bibl. nat., Pièces orig. 40 291. — Arch. de la M., B. 1 958, 1 951 ; Invent. des titres de Gébard ; et surtout le chartrier très considérable du château, donné par le propriétaire actuel. — Baron de Wismes, le Maine et l'Anjou, Lassay. — Arch. de la S., B. 1 222. — Revue du Maine, t. XVIII et XXII, p. 78.