Pontmain - Tome III

Pontmain, con de Landivy (6 kil.) ; arrond. de Mayenne (41 kil. N.-O.) ; à 50 kil. de Laval.

Apud Pontmain, 1205 (Cart. de Fontaine-Daniel, p. 59). — R. de Ponte Menii, 1225 (Cart. de Savigny). — Apud Pontemain, 1238 (Ibid.). — Burgum de Pomain, 1247 (Arch. nat., L. 974, n. 947). — La châtellenie dou Pont Main, 1294 (Cart. de l'Abbayette, p. 47). — Notre court du Ponmain, 1354 (Ibid., p. 51). — Le chasteau de Ponmain, 1372 (Bibl. nat., Clairambault, 110). — Curia du Ponmain, 1401 (Lib. fund., t. I, f. 123). — Le chemin de Saint-Ellier au Ponmain, 1460 (Arch. nat., R/5. 386). — Le bois du Pommain, 1489 (Arch. nat., JJ. 217, f. 98). — La saincte chapelle de Pontmain, 1594 (Reg. par. de Saint-Ellier). — Le bailli du Pontmain, 1679 (Chart. de Lévaré). — Le Pommain en Saint-Élier (Carte cénom.). — Pommain, auxiliaire de Saint-Ellier (Jaillot). — Pontmain (Cassini).

Géologie. — « Granite avec schistes précambriens, modifiés au S.-E. — Filons de diabase. — Limon des plateaux. » D.-P. Œ.

Petit territoire présentant une ligne médiane de hauteurs du S. au N. (205, 174), entre la vallée de la Futaie, à l'E., et celle de Glaine, à l'O. (110 à 120 m.). — On cite en 1460 le chemin de Pontmain à Saint-Ellier ; en 1492, la grand rue au bourg de Pontmain et, en 1656, « le chemin anciennement appelé les rues du Ponmain », qui passait à la Guédonnière de Saint-Aubin-Fosselouvain. Le tracé de cette dernière voie, vicinalisée en partie, est parfaitement reconnaissable et fait limite entre Lévaré et Désertines. Jaillot fait passer au N. la route de Landivy à Fougerolles. Aujourd'hui communications avec : Saint-Mars-sur-la-Futaie (4 kil. E.) ; Saint-Ellier (5 kil. S.) ; la Bazouge-du-Désert (3.500 m. O.) ; Landivy (5.500 m. N.). Le tramway de Laval à Landivy a une station à l'entrée du bourg.

Population paroissiale. — 250 communiants en 1778 ; — 450 hab. en 1840. — Population communale : 559 hab. en 1881 ; — 597 hab. en 1891 ; — 672 hab. en 1900, dont 127 agglomérés dans le bourg et le reste disséminé en 45 villages, fermes, closeries ou écarts. On comptait 31 fermes en 1840. En dépendent : la Patrie, 23 hab. ; les Ansquillères, 21 hab. ; la Bourbe, 24 hab. ; la Métairie, 19 hab. ; la Croix-de-la-Piroterie, 30 hab. ; les Chesnots, 18 hab.

Un poste de gabelle y était établi, 1746, 1762.

Recette auxiliaire de poste ; — perception de Montaudin.

Industries anciennes : Moulin à draps, tenu par héritage, à 4  de rente, par les héritiers de feu Jean Jourdan, 1421. — Grosses forges et moulin installés par le seigneur de Goué sur le fonds du seigneur de Mayenne à qui il payait « neuf vingts livres de rente par an ». Le 15 mars 1561, le seigneur de Goué dénonce au duc de Mayenne les violences « memmement desgatz et embrasements » commis depuis six mois sur ces forges par le seigneur de Mausson et ses complices. — Moulins à papier entre Pontmain et le moulin de Mausson, 1628.

Foires, le 18 juillet et le 28 octobre, établies, 1487, par Charles VIII, à la requête du seigneur de Mayenne, et marché le lundi de chaque semaine. Les halles et le marché existaient encore en 1638.

Paroisse, anciennement chapelle auxiliaire de Saint-Ellier, érigée en succursale par ordonnance du 26 mars 1840, en commune par décret du 2 septembre 1876, de l'archiprêtré d'Ernée et du doyenné de Landivy.

Église paroissiale, dédiée à saint Simon et saint Jude, dont les statues sont au maître-autel. Deux grandes chapelles s'ouvraient sur le chœur. Celui-ci venant d'être reconstruit (1901) les chapelles forment transept. Le tout est sans style, les autels sans valeur. Les anciens fonts, double cuve hexagonale en granit sculptée sur chaque face d'arcatures gothiques à redents, d'un travail assez fini, sont relégués au cimetière avec de nombreuses statues de diverses provenances, en bois et en pierre, mais sans art : sainte Apollonie, saint Yves, saint Fiacre, sainte Anne, saint Mathurin. Par contre, une belle Vierge du XIVe ou du XVe s., en pierre dure, enlevée aussi de l'église, emportée pour un temps à la chapelle Saint-Jouanne en Saint-Mars, occupe maintenant une niche à la façade du presbytère. L'évêque ordonna en 1779 l'établissement de nouveaux fonts dans l'église ; le clocher avait besoin d'être reconstruit en 1789. Dans le mur d'enclos est encastrée une pierre tombale chargée de quatre écussons presque frustes. Gilles Greslé, sieur de Villeneuve, bailli de Landivy, fonda en 1700 à P., quatre messes par an, à condition que la fabrique fournirait les cierges et qu'on lui permettrait de placer un banc dans la nef près de l'autel Saint-Denis et Saint-Fiacre au côté de l'évangile.

Ce pauvre édifice paraît encore plus triste dans le voisinage de la riche basilique et des édifices rapidement élevés pour les besoins du pèlerinage. Le 17 juin 1873, Mgr Wicart bénissait la première pierre d'une église qui, élevée sur les plans de M. Hawke, était achevée et bénite le 27 juin 1874. C'est une croix latine avec chœur à pans coupés, bas-côtés séparés de la nef par de forts piliers barlongs supportant les voûtes, et par une double colonnade soutenant la galerie qui règne tout autour de l'édifice. D'un pilier à l'autre des cintres surbaissés servent d'assises aux grandes fenêtres que comporte le style ogival du XIVe s. Dans le plan primitif, une flèche monumentale en granit devait s'élever sur l'intertransept. Mais on n'a pas jugé les piliers de 3 m. carrés et les arcs-doubleaux en granit qui les relient suffisants pour la charge. La flèche centrale a donc été remplacée par deux tours en avant de la façade, formant péristyle et couronnées par des flèches d'un travail soigné ; le tout est d'une grande élégance à ne voir ce hors-d' œuvre qu'en lui-même. Le granit forme tout le revêtement extérieur de l'édifice, mais on a cru devoir employer la pierre blanche aux cintres et aux fenêtres, mélange d'un effet plutôt fâcheux.

Vicaires de Saint-Ellier desservant Pontmain : Richard Boivin, 1700. — Louis Leprieur, 1720. — Michel-François Boget, « équivoque pour les mœurs, très borné » (note de l'évêché en 1778). — Julien Chappedelaine, du diocèse de Coutances, vicaire de Saint-Ellier. 1780, 1786, « doux et de bonnes mœurs, ayant des talents et faisant les écoles avec succès » (note de l'évêché). — Jean Bazin, né en 1754, à Marcilly (Manche), 1788. prêta, le 13 février 1791, le serment avec restriction catholique, quitta alors Saint-Ellier avec son confrère, André Lesage, et avec lui se fixa à Pontmain qu'ils administrèrent jusqu'au printemps 1792, époque à laquelle le « mauvais esprit des desservants » fut dénoncé au département, l'église fermée et eux-mêmes obligés de prendre le chemin de l'exil. A son retour d'Angleterre, 1802, M. Bazin reprit son poste qu'il quitta pour la cure de Saint-Ellier, 1803. — Gourdon de l'Épine, 1803. — Michel-Pierre-Alexandre Tencé, 1803, † 1829. — Michel Guérin (V. ce nom), 1829, installé définitivement à Pontmain, le 7 novembre 1836, † 1872. Après lui, la desservance de la cure fut confiée aux Oblats de Marie-Immaculée : Marais, 1872-1880. — Huard, 1880-1884. — Berthelon, 1884-1891. — Pays, 1891.

Écoles. — Julien Chappedelaine, chapelain en 1780, « faisoit les écoles avec succès » (note du doyen). Actuellement école libre congréganiste, construite en 1883 pour 21.750 fr. ; une école laïque est en projet ; école de filles tenue par les sœurs de Rillé, appelées par M. Guérin.

Bureau de charité, jouissant d'un revenu de 1.019 fr.

Féodalité. — La châtellenie de P. fut toujours membre de la baronnie, puis marquisat (1544), puis duché de Mayenne (1554). En relevaient nuement : Lévaré, le Buron, le Parc de Goué, la Prévôterie, Hémenard, la Biardière, Avrillé, Orcisse, la Chancellerie (Saint-Ellier), le Lac (Larchamp), etc. La juridiction s'exerçait au bourg de la Tannière par un bailli, un lieutenant, un avocat et un procureur fiscal. Le sceau des contrats était comme toujours aux armes du seigneur de Mayenne. Au cartulaire de l'Abbayette on en trouve une empreinte de 1371 aux armes pleines de Louis de France, duc d'Anjou (p. 51), et une seconde, de 1421, aux armes parties du même et de Marie de Blois (Bretagne), sa femme, quoiqu'ils fussent morts depuis 1384 et 1404. Les sceaux de Pontmain aux armes de Lorraine se rencontrent assez fréquemment. Celui qu'on a adopté récemment pour médailles et publications diverses, où l'on voit une sorte d'étoile à 3 rayons débordants d'un écusson, est de fantaisie. M. l'abbé Pointeau en a fait l'aveu et en attribue la paternité à M. Friteau, de Pontmain. Le boisseau seigneurial, d'abord de 12 livres 8 onces, était de 30 livres en 1628, et enfin de 40 livres après vingt-cinq ans de contestations, en 1789.

Le château, puissante forteresse des sires de Mayenne à la limite de Bretagne, saccagé pendant les guerres anglaises, fut certainement reconstruit pour une partie et habité par les officiers de la châtellenie au XVIe s. Quelques pierres de taille, qui ont été extraites des ruines par le propriétaire actuel, portent des ornements de cette époque. M. Morin du Tertre possède aussi une houe, deux haches de bûcherons, un pic, un étrier avec son éperon, des coutelas, couteaux, poignards avec virole en cuivre, un fer à mulet, des clefs, le tout fortement oxydé, un pied de marmite ou cassolette en bronze, un grelot de même matière, trouvés dans le sol, où les défenses de sangliers et les coquilles d'œufs surtout abondent. L'enceinte, toujours bien marquée, forme un carré irrégulier de 70 à 80 m. environ sur chaque côté. La partie habitée était vers le bourg. Un fragment de voûte d'un pont ou d'une porte, avec claveaux plats de 0 m. 80 de hauteur, gisait il y a deux ans à l'entrée de l'enceinte, de ce même côté. Un étang formé par la petite rivière entourait tout le château, sauf sur le côté S.-O. où un immense fossé dont les terres avaient été rejetées en dehors se remplissait lui aussi de l'eau de la rivière. On ne peut rien dire de la forme ni de l'âge des anciennes constructions. Les capitaines furent ordinairement les mêmes que ceux de Mayenne.

Ce château — ou plutôt ces ruines, — donné à rente pour 60  par François de Lorraine (1554-1563) à Jacques de Goué, sous réserve des droits seigneuriaux, échut en partage à Yves du Pontavice, gendre de Jacques de Goué, avec les quatre métairies prises par défrichement sur les bois voisins, et fut acquis par Guy de Scépeaux, seigneur de Mausson, dont les successeurs possédaient encore ce domaine en 1669.

Notes historiques. — Des tombeaux en pierre ont été trouvés dans l'ancien cimetière et employés en débris dans la construction de maisons voisines. — Localités de noms anciens : Chanteil, Villeneuve, Ortier, Theufeu (anciennement Tofou), L'Habit. — Savigny reçut plusieurs dons dans le bourg même de P., 1225, 1247, 1296. — On trouva en terre, dans deux vases, en 1875, un trésor de quinze cents monnaies d'argent de provenances très diverses et dont les dernières qu'on puisse dater appartenaient aux règnes de saint Louis et d'Henri III d'Angleterre. Un pareil trésor ne pouvait appartenir qu'à un riche seigneur et son enfouissement vers le milieu du XIIIe s. doit avoir été motivé par une panique.

En 1358 et 1364, par crainte des Anglais, les sujets de Fontaine-Daniel et de Savigny sont appelés à faire le guet au château. Jean des Vaux reçoit 200 francs d'or, le 17 septembre 1372, pour une année écoulée de ses gages à la garde du château, et le 10 février 1378 (v. s.), « pour obvier aus évidens périls », on fait encore appel, malgré leur exemption, aux sujets de Savigny. Une monnaie de Jeanne d'Anjou, qui légua les états de Sicile à Louis d'Anjou, baron de Mayenne, en 1380 ; légende : Pour le vrai savoir ; une autre en or de Jean Sans-Peur, duc de Bourgogne, 1371-1419, trouvées récemment, témoignent de l'occupation du château à la même date. Il dut disparaître comme place forte dans cette première période de la guerre séculaire car si le capitaine reçoit en 1415 des ordres et des fonds pour ses réparations, quand on y vient en 1430 pour rendre foi et hommage, on le trouve désert.

La guerre de conquête de la Bretagne donna lieu à des incidents sur la frontière ; on mentionne spécialement un combat « au bois de Ponmain, » le 25 avril 1487. Rien dans ces quelques données historiques ne fournit l'explication de l'exemption d'impôts du Petit-Maine.

Le 17 janvier 1871, de six heures à neuf heures du soir, se produisit à la clarté des étoiles d'une nuit glaciale un événement d'une autre nature. L'armée française, démoralisée par la défaite, décimée par la maladie plus encore que par le fer, était acculée à ses dernières lignes de défense. La France croyante s'était agenouillée devant Dieu. C'est alors que quatre petits enfants de neuf à douze ans, de l'humble bourgade, furent les heureux témoins d'une vision consolante, les premiers objets d'une visite de la Vierge que nous invoquions, leur annonçant la paix dans une inscription où ils lurent ces mots en lettres d'or : Mon Fils se laisse toucher. L'identité et la simultanéité de la vision pour les quatre enfants qui en suivirent toutes les phases imprévues et étranges avec les manifestations d'une surprise ingénue et l'assurance de témoins oculaires, rendent cette apparition céleste indiscutable entre toutes. C'est l'impression qui se dégage de la lecture du récit rédigé dès les premiers jours qui suivirent le prodige par M. Richard. Les événements qui eurent lieu après l'apparition, le concours des populations, les établissements religieux qui se sont ouverts, les voies nouvelles, tramway compris, qui rayonnent maintenant autour de la bourgade devenue centre communal, ont donné raison à l'ancien dicton :

Quand Paris brûlera, Pontmain se relevera.

Maires : Vital-Arsène Friteau, 1876-1888. — Morin du Tertre, 1888-1892. — Friteau, 1892.

État-civil depuis 1876 et chron. par. mss. — Comm. hist. de la M., t. I. p. 30 ; t. III, p. 151. — Cart. de l'Abbayette et de Savigny. — Arch. nat., L. 969, 972, 974 ; P. 398, 1.334/4, f. 132 ; Tit. du Comté d'Anjou, t. I, f. 787, 794. — Ch. Pointeau, note mss. et art. de la Sem. relig., à partir de septembre 1872. — Chart. de Lévaré. — Aveu de Mayenne, 1669. — Memor. de la Mayenne, t. IV, p. 393. — A.-M. Richard, L'Evénement de Pont-main. — Vandel, Les impressions d'un pèlerin. — Couanier, Vie de Mgr Wicart, chap. IV, et Pèlerinages, p. 471. — Bonnel, N.-D. de Pontmain. — (L. Bastard), N.-D. de Pontmain.
Pour les localités, voir l'art. le Petit-Maine.